Hier…
J’étais un simple fonctionnaire hospitalier. Ancien kiné en gériatrie, abimé par la maladie et par mon métier, je tentai une reconversion après avoir été imprégné par l’ergonomie. Je voulais faire de la prévention, je le sentais au fond de moi.
Et voilà, je me retrouve un soir de novembre 2015, plongé dans l’horreur. Dans l’horreur absolue. Dans la violence aveugle infligée à autrui. Dans la barbarie.
Je voulais raconter mon histoire. Je ne pouvais pas garder tout cela à l’intérieur. Il fallait que ça sorte de moi. J’ai commencé à écrire plusieurs pages, seul. Un texte simple où je voulais raconter cette soirée, ces instants terribles. Mais, je ne suis pas un littéraire. Surtout, je ne mesurais pas encore l’impact majeur de ces évènements sur moi. Et comment transformer cette expérience si violente ?
Bien avant les attentats, j’avais lu un article sur un véhicule électrique testé par Judith Lossmann. Je me souviens de cet échange simple et presque complice que nous avions eu à l’époque. J’ai pris l’habitude de suivre ses publications. C’est ainsi que j’ai découvert qu’elle accompagnait aussi les gens dans leur travail d’écriture, une spécialité, baptisée LittéroThérapie®. Le temps a passé. Les attentats sont survenus. Je cherchais quelqu’un pour m’aider à écrire, pour dépasser mes premières pages « crachées » hors de ma mémoire. Mais, je ne mettais rien en route… Sur les réseaux sociaux, j’ai publié l’annonce de mon interview dans Grand Reportage sur TF1. Judith a été très émue, elle m’a contacté, m’invitant à réfléchir à une écriture. Une thérapie par l’écrit, ça parait évident … Chez la psy, c’est elle qui écrit et moi qui raconte. Ici c’est l’inverse, on retravaille mes écrits, on affine les phrases, on débusque les mots clefs, les idées, les pensées. Les mots sont ma matière dit Judith et c’est vrai. Elle a un sens de la musicalité des mots et des phrases. Elle sait « mettre en musique » mes pensées. Et ce n’est pas si simple…
Pendant les séances thérapeutiques (toute la première partie du travail), il me fallait exorciser, comprendre, construire, expliquer, être ! Je m’écoutais raconter tout ce qui sortait de ma tête pendant les séances et Judith, m’aidait à le verbaliser de telle façon que je pouvais m’entendre et l’entendre autrement. Puis, j’écrivais… Souvent, je m’autorisais à dire des choses que je n’osais pas dire à qui que ce soit d’autre, moi en premier ! Ici, rien de ce que je pensais ou disais n’était jamais une mauvais pensée. Séance après séance, les bienfaits de la LittéroThérapie, qui me libérait, m’autorisait à mieux communiquer avec mon cercle familial. Sur le papier nous avions beaucoup en commun : des complémentarités culturelles et identitaires. Dans la seconde partie de notre travail, il s’est agi en permanence de conjuguer nos mots et nos rythmes pour raconter une histoire unique. De fait, Judith et moi avons créé une relation en-dedans et au-delà de ce livre..

Nous avons eu beaucoup de difficulté pour créer cet objet littéraire inclassable ! A la fois récit cathartique, analyse, synthèse, propositions … un peu tout à la fois, reflet du chamboulement de ma vie. Souvent, ce fut très dur ! Et parfois, ce travail me donnait l’impression de rester accroché à mon passé, de m’empêcher de continuer à avancer, de refuser l’oubli, d’être obligé de faire avec quand autour de moi le monde faisait sans ! Toutes les fois où j’ai voulu arrêter, j’ai pensé à cet outil livre dont je pourrai me servir un jour quand je l’aurais en mains …
Dans ces très longues séances et durant plus de deux ans, nous avons, chacun, dépasser nos égos, nos intérêts individuels. Chacun a fait des sacrifices, des choix, des investissements pour, ensemble, s’effacer devant l’impérieuse nécessité de témoigner, d’éveiller les consciences, de construire l’Initiative Citoyenne En Cas d’Urgence.
Nous y sommes arrivés ! Certains chapitres ont été plus complexes à modeler. Malgré le propos, il fallait les rendre fluides à la lecture, entendables par chacun, compréhensibles par tous et surtout intéressants jusqu’au bout.

Demain…
C’est prendre des positions, construire ma vie à partir de ce travail. Défendre cette cause est devenu mon projet de vie professionnelle au travers de ma mission de Témoin Expert Attentat. Et comme le dit Judith : l’histoire n’est pas finie ! La « mission » est aussi immense que le travail !

Pour toujours…
Avoir été Aidant de Première Ligne, avoir co-écrit “Impacté  13 Novembre” avec la LittéroThérapie a changé mon destin.